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Parce qu'avant d'être lesbiennes, on était juste humaines
26 novembre 2015

La vie d'adultes

 

Sans titre 1

 

Jusque là tout allait bien.

 

Nous avions un appart minuscule (et le loyer qui allait avec), deux fiat punto (et les réparations qui allaient avec), nous avions arrêté de fumer (+300e par mois) et ne sortions plus jamais le soir (fini de payer 25e pour entrer dans un entrepôt diffusant les hits pourris de NRJ, fini le jus d'orange à 9e). On n'allait jamais chez le médecin, jeunes et en bonne santé, on n'allait jamais chez le dentiste parce qu'on aimait pas ça et qu'on s'en foutait (ma dent tombe miette après miette ? Pas grave, on verra si ça repousse), on n'allait jamais à la banque parce qu'on n'avait pas d'argent à gérer. On était insouciantes, sans charges, sans devoirs. On pouvait claquer une paye sur un coup de tête pour visiter Reykjavik pendant 3 jours ou s'acheter une moto qu'on utiliserais 5 fois.

 

  Et puis vient le jour où la réalité vous rattrape.

 

Le jour où vous faites les comptes de ce qu'il va falloir pour entamer un projet bébé. Et BAM : vous entrez dans la vie d'adultes. Comme ça d'un coup. Pas d'échappatoire. A partir de maintenant il vous faudra :

 

- garder un travail fixe. Plus le droit d'insulter le patron et de claquer la porte.

- se renseigner pour acheter une maison, se taper l'intégrale des émissions de Stéphane Plaza

- acheter une voiture familiale, apprendre à se garer avec un mini-bus, la rayer 2/3 fois.

- entrer dans le joyeux monde des crédits, tisser des liens étroits avec sa banquière.

- culpabiliser à chaque fois qu'on se fait un resto parce qu'on aurait dû mettre cet argent de côté pour les futures études du petit. Ouais mais bon, au cas où il finit joueur d'accordéon dans le métro, on va pas trop se priver d'avance quand même.

- connaître les joies incommensurables du gynéco, des frottis et des radios pelviennes

- se faire vider de son sang plusieurs fois et se le faire analyser dans tous les sens

- autoriser au moins une quinzaine de professionnels différents à regarder entre nos jambes

- aller se faire inspecter et réparer toutes les dents avant d'être enceinte, sans bien saisir le lien entre les deux parties du corps.

- se renseigner sur les maternités et toutes les subtilités des 'options bien-être' qu'elles proposent

- entrer le monde presque sectaire des crèches et des nounous (t'en connais une bonne toi ? Ouais jte refile son numéro mais tu la gardes pour toi hein )

- chercher des solutions de garde (maman, je sais que j'ai toujours critiqué mon éducation, mais euh, tu vois là on se ferait bien un week end et euh…)

- se faire détester de l'employeur quand il apprendra la grossesse. Deux nouvelles mamans dans votre entreprise en même temps ? Oui c'est fâcheux. Attendez que la deuxième mette en route le petit frère, on va se marrer.

- dans les moments shopping, dire adieu aux « j'adore/ça fera trop bien dans le salon/et si on s'achetait ça ? » et apprendre une seule phrase « ce sera pratique »

- faire un maximum de siestes et de grasses mat. En prévoyance des longues nuits remplies de pleurs aigus, puis des longues heures à rester éveillées pour guetter s'il a cessé de pleurer parce qu'il a avalé sa langue.

- chercher des prénoms, passer son temps sur les sites internet à la con qui t'expliquent que Téo est un hommage au nom du roi des vikings de l'an 204.

 

Et encore, tout ça, c'est commun à tous futurs parents. Le fait d'être deux futures mamans rajoute quelques difficultés :

 

- changer de papiers pour bien signifier que nous serons une famille

- se ruiner en achat de sperm (surtout, éviter de penser à toute cette précieuse matière qui se perd dans les mains de millions de célibataires. Combien de litres essuyés au fond d'un mouchoir, dans le monde, au moment où tu envoies tes 4000 balles à l'autre bout de l'Europe pour avoir 6 pauvres pipettes ? Ne pas y penser, ne pas y penser, ne pas y penser.)

- se faire tirer l'utérus avec des pinces, s'y faire injecter un liquide, et recevoir de jolies photos de ton utérus en train de rejeter le liquide. Ca s'appelle une hystérographie et c'est un truc barbare.

- trouver un gynéco qui veuille bien accompagner un couple de femmes sans penser que c'est une aberration de la nature.

- faire des allers-retours en Belgique pour des RDV médicaux d'à peine un quart d'heure.

- passer devant un jury qui détermine après délibération si nous sommes aptes à être parents

- apprendre à se piquer le ventre avec une seringue chaque jour entre le premier jour de règles et l'ovulation

- attendre des mois que la procédure se complète et se mette en place. Parfois des années.

 

Enfin. Tout ça pour dire que la vie d'adultes pour l'instant, c'est vraiment nase.

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Commentaires
B
Petite parenthèse, ça me révolte qu'on fasse passer des tests psy aux couples homos quand on pense à tous les attardés hétéros qui en font à la pelle...Bref....
Parce qu'avant d'être lesbiennes, on était juste humaines
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Parce qu'avant d'être lesbiennes, on était juste humaines
  • Une histoire d'Amour, un appartement, un chien, un mariage, des enfants... La vie rêvée du petit couple ordinaire. Un conte de fées à un détail près : quelques (grosses) embûches sur le chemin de la banalité, quand on est lesbiennes.
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